« Prière pour Marta », l’hymne de la révolution de Velours

Ou comment une chanson écrite pour une série devient un chant révolutionnaire.

Le 17 novembre 1989, une manifestation étudiante est violemment réprimée par la police à Prague et marque le début de la révolution de Velours, qui entraînera la chute du régime communiste et la tenue d’élections libres en juin 1990. Et dans les manifestations qui ont suivi celle des étudiants, la chanson Modlitba pro Martu (« Prière pour Marta ») est chantée à plusieurs reprises, jusqu’à devenir un hymne révolutionnaire. Elle est devenue si populaire qu’elle sera diffusée dimanche 17 novembre à 17h11 sur les radios du pays, pour célébrer les 30 ans de la révolution de Velours. Tous les Tchèques connaissent les images célèbrent de la population rassemblée sur la place Wenceslas (Vaclávské Naměstí) tandis que Marta Kubišová, l’interprète a capella depuis le balcon d’un hôtel, dans un silence religieux.

La chanson et son interprète n’ont pourtant rien de révolutionnaire à l’origine. Marta Kubišová indique sur Radio Prague que « La prière pour Marta a été écrite à l’origine pour une série télévisée [Píseň pro Rudolfa III., ndlr]. L’auteur du texte a utilisé deux vers de Comenius qui sont sur le monument de Jan Hus, place de la Vieille-Ville à Prague. »

C’est l’invasion de Prague par l’Armée rouge en 1968 qui donne une dimension politique à la chanson. Les paroles, et principalement le premier vers (« Ať mír dál zůstává s touto krajinou », « Que la paix reste dans ce pays »), résonnent particulièrement tandis que les troupes étrangères occupaient le pays. Le régime communiste finit par interdire la chanson en 1970, et Marta Kubišová se voit interdire de poursuivre sa carrière musicale. Elle rejoint petit à petit les rangs des dissidents et signe la Charte 77, dont elle devient la porte-parole en 1977 et 1978.

Quand la révolution de Velours débute, l’année 1968 est dans toutes les mémoires. La population ne veut pas laisser échapper cette nouvelle chance de liberté. Et c’est tout naturellement que la  « Prière pour Marta » connaît une seconde vie.