La grève du 27 novembre 1989, pivot de la Révolution de velours

Retour sur les deux heures qui ont fait chuter le communisme.

C’est l’un des événements qui ont fait basculer la Révolution de velours. Le 27 novembre 1989, une grève générale paralyse le pays durant deux heures, entre midi et 14 heures. D’après les estimations, elle a été suivie par 75% des travailleurs. Dix jours après la mobilisation des étudiants, le coup est rude pour le régime communiste, qui découvre que le désir de changement est bien plus important qu’il n’apparaissait. Le mouvement, qui semblait auparavant cantonné à une certaine élite (étudiants et artistes), touche l’ensemble de la population.
Il s’agit alors de la première grève générale depuis février 1948, quand les communistes ont pris le pouvoir. Parmi les exigences des organisateurs de la grève figuraient la fin du gouvernement à parti unique et la tenue d’élections libres. A l’époque le rôle dirigeant du parti communiste (KSČ) était inscrit dans la Constitution. 

Le pouvoir a tenté de faire pression pour limiter l’impact de la grève. Le matin même, le service de renseignements (Státní Bezpečnost, StB) a collé des affiches dans les rues de Prague pour dissuader les citoyens d’y participer. Las, 300 000 personnes se sont rassemblées sur la place Venceslas (Václavské náměstí). Même à Ostrava, ville peu réputée pour son engagement politique et bastion communiste, 20 000 personnes ont manifesté. Les mineurs, pourtant érigés en modèles par le régime communiste et bénéficiant de salaires élevés, se sont joints au mouvement. Et même si, deux jours plus tard, 8000 personnes se sont rassemblées à Ostrava dans une contre-manifestation à l’appel du parti communiste, le mal était fait.

Le soutien massif au mouvement initié par le nouveau parti Forum citoyen (Občanské fórum, OF), fondé par Václav Havel, a immédiatement dissuadé le régime communiste de réprimer la contestation. Cela aurait été d’autant plus injuste que les grévistes ont par la suite rattrapé leurs heures non travaillées pour ne pas pénaliser l’économie du pays. Deux jours après la grève, la Constitution était modifiée et le marxisme-léninisme n’était plus l’idéologie de l’Etat, ouvrant la brèche qui a débouché sur l’élection de Václav Havel comme président le 29 décembre, puis sur la tenue d’élections libres en juin 1990.